Atelier "Bien-être animal"
Organisation : Myriam Amari (ENS), Marc Fleurbaey (PSE, ENS), Audrey Maille (MNHN)
Dates : S2, mercredi, 12h30-14h, 12 séances, à partir du 5 février 2025
Salle : Salle du CERES (24 rue Lhomond)
Résumé
Les idées sur la question du bien-être animal évoluent rapidement dans notre société. Le grand public, les consommateurs, les éleveurs, les zoos, les aquariums et le milieu de la recherche y portent un intérêt croissant. Cela est en partie porté par des ONG et des mouvements inspirés par divers courants, dont le livre pionnier Animal Liberation de Peter Singer. Du côté de la recherche, les choses bougent également. Les avancées en zoologie, physiologie, éthologie et sciences cognitives révèlent que de nombreuses espèces sont sensibles à la douleur et démontrent des niveaux de conscience avancés. Il est donc crucial de garantir de bonnes conditions de vie à ces êtres sentients, et de nombreux outils comportementaux et cognitifs sont maintenant disponibles pour identifier leurs besoins. Des initiatives interdisciplinaires cherchent à chiffrer les bénéfices sociétaux de progrès dans la protection du bien-être animal, aussi bien dans l’élevage que dans les milieux naturels. Ces travaux ont une importance cruciale pour mieux évaluer notre impact sur la biodiversité, mais aussi pour la conservation des espèces protégées.
Cet atelier combine des éléments relevant de l’éthologie, des neurosciences, de la philosophie et de l’économie pour explorer les méthodes d’analyse de données comportementales ou physiologiques dans le but de mesurer le bien-être d’espèces variées dans différents milieux de vie, et d’arbitrer entre les intérêts plus ou moins opposés de diverses espèces. Des méthodes qualitatives (entretiens) ou quantitatives (analyse de données audiovisuelles, machine learning, observations de terrain) peuvent être envisagées selon les souhaits et capacités des étudiants.
Programme détaillé en 2025 :
Les principaux thèmes abordés dans les séances introductives seront les suivants :
- définitions du bien être animal et concept de besoins et de libertés
- nécessité d’identifier des indicateurs quantitatifs pour une évaluation objective d’états individuels subjectifs
- apercu rapide des indicateurs zootechniques et physiologiques
- présentation des indicateurs comportementaux (agressivité, fuite, redirections et stereotypies)
- effet compensateur des interactions sociales
- influence des interventions anthropiques in situ et ex situ (perceptions des humains, réponses aux enrichissements) : cas concrets chez les primates
- les émotions animales et la façon de les mesurer par des approches cognitives mesurant les biais de jugements/d’attention/de mémoire
- mesures de tempérament/personnalité
- le concept d’ "agency" et pourquoi c’est crucial pour les animaux en captivité d’avoir un contrôle sur leur environnement et de pouvoir effecteur des choix
- les enrichissements cognitifs
- le jeu comme indicateur de bien-être
- les concepts et approches du bien-être (objectives, subjectives, preference-based)
- la problématique des comparaisons entre individus, et les difficultés particulières aux comparaisons entre individus d’espèces différentes
- les notions de sentience et d’agence comme critères de valeur morale des individus
- les tentatives d’opérationnalisation de mesures du bien-être animal dans les analyses coût-bénéfice
- la localisation de la valeur de la biodiversité dans les individus ou dans des groupes (espèces)
- valeur intrinsèque et instrumentale de la biodiversité
Après les séances introductives, des groupes de projets (de 3 à 5 étudiant.e.s) seront mis en place et aidés dans leur progression (conseils, interactions entre groupes, accès au terrain et aux données) vers un rapport remis à la fin de l’atelier.
SOUS RESERVE : Nous proposerons une réflexion collective sur le bien-être des primates étudiés dans le cadre de la recherche scientifique. Les étudiant·es auront accès à deux jeux de données pré-existants qui pourront être analysés au cours de l’atelier. Le premier jeu de données sera composé de plusieurs dizaines d’heures d’enregistrements video, collectés en 2024 lors de la mise au point de tests sur écrans tactiles avec les orang-outans de la Ménagerie, le Zoo du Jardin des Plantes (MNHN, Paris), dans l’objectif de mesurer les occurences de comportements indicateurs de bien-être/mal-être exprimés pendant les tests. Le second jeu de données contiendra les réponses de 96 personnes anonymes, receuillies lors d’une enquête par questionnaire ciblant la communauté des primatologues francophones (accessible en ligne entre mai 2023 et avril 2024), et destinée à analyser l’adéquation entre les préoccupations, la législation et les pratiques des primatologues. A ces deux jeux de données, les étudiant·es pourront ajouter des élements complémentaires issus de leurs propres observations, enquêtes ou revues de littérature, en vue de mieux cerner la thématique trans-disciplinaire de l’atelier.
